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Photo du rédacteurSacrée Maman

L'incroyable destin d'Henrietta Lacks

Dernière mise à jour : 28 févr.


Statue d'Henrietta Lacks  - 2021 -  l'université de Bristol (Royaume-Uni).
Statue d'Henrietta Lacks - 2021 - l'université de Bristol (Royaume-Uni).

Pour comprendre l'histoire de cette femme, il faut se remettre dans le contexte de l'Amérique ségrégationniste (1875-1960). À cette époque, les "gens de couleur", citoyens de seconde zone, n’avaient pas le droit d’aller dans les mêmes écoles que les blancs, boire dans les mêmes fontaines ou de partager le même taxi. Ils étaient privés aussi de droits civiques et étaient en proie au Ku Klux Klan.


Henrietta Lacks (1920-1951), est née dans une famille pauvre du sud des Etats-Unis. À ses quatre ans, sa mère, Eliza Lacks Pleasant, meurt en couches en mettant au monde son dixième enfant. Son père, Johnny Lacks, ne pouvant s’occuper seul de toute sa famille, envoya la petite fille chez son grand-père. Elle grandit ainsi dans la ville de Clover, travailla dans les champs de tabac et épousa son cousin David avec qui elle eut cinq enfants.

À vingt-neuf ans, Henrietta se plaint auprès de ses cousines et ses meilleures amies, elle a un nœud au ventre. Celles-ci pensent que c’est sûrement une douleur due à ses suites de couches puisque sa petite dernière est née quelques semaines plus tôt, elles supposent aussi que cela peut être dû à une MST ou une nouvelle grossesse. Mais Henrietta est persuadée que son nœud n’est dû à rien de tout ça. Une semaine après ses confidences, elle apprend qu’elle est enceinte de son cinquième enfant. L’histoire s’arrête là.


La grossesse se passe, le petit Joe vient au monde, mais la douleur reste et persiste.

Un jour de février 1950, après avoir constaté du sang sur son sous-vêtement et décidée à savoir d’où vient cette douleur, « Elle remplit la baignoire, s’immergea dans l’eau tiède et écarta lentement les jambes. Elle avait fermé la porte pour n’être dérangée ni par ses enfants, ni par son mari, ni par ses cousines. Elle glissa un doigt à l’intérieur de son corps et explora son intimité jusqu’à ce qu’elle trouve ce qu’elle cherchait : une boule dure… Une bille juste à gauche de l’ouverture de l’utérus. » Extrais du livre La vie immortelle d’Henrietta Lacks (Rebbeca Skloot).

La jeune femme, âgée de trente ans, demanda à son mari de l’emmener à la clinique gynécologique de Johns Hopkins, elle y rencontra le docteur Howard Jones qui lui diagnostiqua sans appel une tumeur de l’utérus virulente. Henrietta Lacks décéda neuf mois plus tard, le 4 octobre 1951.

Mais son histoire et sa vie ne s’arrêtèrent pas le jour de sa mort.

Quelques mois avant sa mort, lors d’une opération pour traiter sa tumeur, le chirurgien Lawrence Wharton, préleva à son insu deux échantillons de tissu issus de son utérus, un sain et l’autre sur la tumeur. Il les donna au docteur/chercheur Georges Gey qui les plaça dans une soucoupe de laboratoire afin de faire de la culture cellulaire. Il demanda à son assistante Mary Kubicek de les découper et de les mettre en culture, ce qu’elle fit et inscrit sur les tubes à essais : HeLa.


Il faut savoir, qu’à cette époque, beaucoup de scientifiques tentent par tous les moyens de faire de la culture in vitro des cellules humaines, mais tous échouent inexorablement. Ce fut différent pour celles d’Henreitta, celles-ci doublèrent au bout de vingt-quatre heures. Cette multiplication se répéta tant et si bien qu’elles perdurent encore aujourd’hui.


En conséquence, les cellules HeLa sont immortelles. Henrietta Lacks, elle-même est immortelle. Elle existe encore après sa mort et existera encore après la nôtre.

Depuis 1951, ses cellules sont dans tous les laboratoires du monde. Tous les étudiants, les laborantins, les chercheurs en biologie cellulaire et autres ont travaillé avec. Elles sont devenues un matériel biologique au même titre que les souris.

En plus de soixante ans, les cellules utérines de cette femme, ont soigné et sauvé des millions et des millions de vies sur cette terre.

Elles ont permis de trouver des vaccins comme celui de la polio, des traitements contre « l’herpès, la leucémie, l’hémophilie et la maladie de parkinson, d’étudier les maladies sexuellement transmissibles, la découverte du génome humain, l’identification d’un récepteur clé dans l’infection du virus HIV. Deux prix Nobel ont été décernés grâce à ces cellules, elles ont même été envoyées dans l’espace... La liste est si grande que je ne peux pas tout citer.

Il n’y a pas d’histoire extraordinaire sans injustice, Henrietta Lacks, cette Afro-Américaine des années cinquante, mère de cinq enfants, fut enterrée dans un trou sans pierre funéraire et ses héritiers vivent encore aujourd’hui dans la pauvreté. Les cellules volées d’Heinrietta Lacks ont permis de faire avancer la médecine sans que personne le sache et sans considération. Si l’histoire de cette femme n’a jamais été divulguée, c’est pour deux raisons simples : La honte et la cupidité.

Les laboratoires se sont enrichis grâce aux cellules HeLa et sur le dos de cette famille. Pendant des années, pour brouiller les pistes, Henrietta Lacks était appelée Helen Lane ou Helen Larson.






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